Expertise amiable, contradictoire ou judiciaire : Quelles différences ?

Mercredi 15 Juin 2016

Une expertise bâtiment est une procédure visant à confier à un professionnel la mission d’émettre un avis sur les éléments à l’origine d’un différend d’ordre technique ou contractuel. Cette expertise peut prendre trois formes : amiable, contradictoire ou judiciaire.

L’EXPERTISE AMIABLE PEUT ÊTRE UNILATÉRALE OU CONTRADICTOIRE

L’expertise amiable peut être demandée par l’une des parties ou par les deux afin d’obtenir un avis pouvant se transformer au besoin en élément de preuve. L’expert bâtiment a alors pour mission de donner un avis sur un litige existant, mais également risquant de naître. Lorsqu’elle est demandée par les différentes parties, l’expertise est contradictoire alors qu’elle est unilatérale lorsqu’elle est accomplie sans la participation de l’autre partie.

L’expertise amiable, c’est-à-dire non imposée par un juge, peut être menée par deux experts, chaque partie choisissant le sien. Si les deux experts ne peuvent se mettre d’accord, un troisième est alors nommé pour réaliser une expertise en commun et l’accord est conclu à la majorité des voix.

Souvent missionné pour donner leur avis sur des problèmes techniques ou contractuels liés aux domaines du bâtiment ou de la construction, un expert bâtiment qui intervient lors d’une expertise amiable n’a toutefois pas les mêmes responsabilités et devoirs que celui désigné par la justice. Tant sa mission que ses honoraires ou son impartialité ne sont nullement encadrés par le Code de procédure civile. L’expert amiable n’est tenu à rendre des comptes qu’à la personne qui l’a mandaté, ce qui rend d’autant plus efficace une expertise contradictoire demandée et rémunérée par les deux parties.

Si le différend est porté devant la justice, le tribunal est tenu de prendre en compte une expertise amiable et unilatérale versée au dossier. Même si les magistrats ne peuvent se fonder sur cette seule expertise amiable pour prendre leur décision, elle peut l’influencer dans un sens ou dans un autre, surtout si la partie adverse n’apporte de son côté que peu d’éléments contradictoires. A contrario, un juge peut très bien prendre sa décision en fonction des conclusions de la seule expertise amiable sous réserve qu’elle ait été incontestablement contradictoire.

L’EXPERTISE JUDICIAIRE EST OBLIGATOIREMENT CONTRADICTOIRE

Une expertise judiciaire est ordonnée par un juge et contrairement à celle amiable, elle obéit aux règles du Code de procédure civile.

Une première chose à prendre en compte est que même si une expertise judiciaire est décidée par un juge, ce dernier n’est en rien tenu de par ses conclusions. Le rapport de l’expert peut être contesté par une des parties et même annulé, ce dernier point imposant dès lors que l’expertise soit retirée des pièces du dossier.

L’expertise judiciaire est obligatoirement contradictoire et soumise à discussion durant son déroulement. Une expertise qui ne respecterait pas le caractère contradictoire peut être frappée de nullité. Cet aspect contradictoire prend en effet une importance majeure dans la mesure où le juge peut prendre sa décision en se fondant sur la seule expertise. Plusieurs arrêtés de la Cour de cassation ont en effet admis qu’un juge pouvait s’appuyer sur les conclusions de la seule expertise dans la mesure où elle respecte le principe du contradictoire.

Comme on peut le constater, l’expertise amiable ou judiciaire est d’une importance majeure dans de nombreux litiges. Il est par conséquent recommandé que l’expert soit codésigné par les parties ou que ces dernières missionnent chacune le sien.

 

FOCUS

Ce qu’il faut retenir :

L’expert amiable est un technicien mandaté par une partie hors de tout cadre judiciaire. Le juge saisi d’un litige ne peut en principe fonder sa décision uniquement sur une expertise amiable réalisée unilatéralement par une partie.
Par une décision du 19 novembre 2013, la Cour de cassation est néanmoins venue préciser cette règle, dans un sens défavorable aux droits de la défense.
Dans cette affaire, la Cour juge que les parties, en participant aux opérations d’expertise et en acceptant la discussion, ont admis la personne désignée en qualité d’expert pour arbitrer le litige. Les opérations ayant été menées de façon contradictoire, le juge a pu fonder sa décision sur le rapport issu de l’expertise amiable.
Dès lors, la participation à une expertise amiable ne doit être envisagée que moyennant certaines précautions.

JB